Histoire de l'Alsace

L’architecture régionale et la langue alsacienne (incluant divers dialectes alémaniques) en sont des témoins tangibles de l’histoire de cette région. On estime que 600 000 personnes, sur une population d’environ 2 millions d’habitants, parlent l’alsacien. Néanmoins, sa transmission se réduisant, cette langue est menacée de disparition.

 

Longtemps disputée entre la France et l’Allemagne, et partageant une frontière avec la Suisse, l’Alsace est souvent perçue comme une “petite Europe”. Ce n’est pas un hasard si Strasbourg a été désignée comme capitale européenne, abritant le Parlement européen et le Conseil de l’Europe.

Quelle est l’origine de la région ?

La première mention du nom « Alsace » apparaît dans la chronique de Frédégaire, rédigée par divers auteurs au milieu du VIIe siècle. Le texte rapporte : « La quinzième année de son règne, Thierry, conformément à la volonté de son père Childebert, possédait l’Alsace, où il avait été élevé, et fut entraîné par Théodebert dans une guerre sauvage ». Cette citation, traduite du latin, atteste de l’ancienneté du nom Alsace.

 

Les origines du nom « Alsace » sont sujettes à plusieurs hypothèses. Une théorie celtique propose « Alisa », signifiant « le pays au pied de la falaise ». Les théories germaniques suggèrent « Illsass », désignant « le pays traversé par la rivière Ill », ou « Alisass », signifiant « le pays étranger ». La rivière Ill, qui se jette dans le Rhin au nord de Strasbourg, pourrait justifier ce nom. Pour mieux comprendre ces dénominations, il faut revenir au début du Ve siècle, époque où les Alamans, initialement sous domination romaine, s’installent dans la région.

Au début du Ve siècle, les Alamans, situés entre les Vosges et le Rhin ainsi que dans l’actuel Bade-Wurtemberg, mettent fin à la domination romaine et s’emparent de ces terres. Un siècle plus tard, Clovis, roi des Francs, conquiert les territoires alémaniques situés sur la rive gauche du Rhin. Si le nom Alsace signifie « pays étranger », cela pourrait désigner soit les terres perdues par les Alamans, soit les nouveaux territoires acquis par les Francs.

Domination des Francs

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Au début du VIe siècle, les Francs étendent leur domination sur les Alamans de l’autre côté du Rhin, bien que ces derniers restent turbulents. Vers 640, les Francs créent le duché d’Alsace, confié à la dynastie franque des Etichonides, qui correspond à peu près aux limites actuelles de l’Alsace. La région, majoritairement peuplée d’Alamans, conserve un héritage linguistique notable : les dialectes alsaciens sont des variantes de l’alémanique, sauf au nord de Haguenau, où le francique prédomine. Le duché d’Alsace, fondé au VIIe siècle, perdure environ un siècle, marquant notamment la fondation du couvent de Hohenburg, aujourd’hui connu sous le nom de Mont Sainte-Odile. Il disparaît au milieu du VIIIe siècle, laissant place aux comtés de Nordgau et de Sundgau.

Christianisation et période carolingienne

Au VIIe siècle, les premières mentions écrites de la région actuelle de l’Alsace apparaissent sous les noms de Alesaciones et Alesacius. Durant cette époque, la christianisation progresse avec l’édification de nombreuses églises et monastères. Ces institutions jouent un rôle clé dans la diffusion du christianisme et la consolidation de la foi parmi les habitants. Les moines participent à l’éducation et à la préservation des savoirs anciens, faisant de l’Alsace un centre important pour la transmission des connaissances.

 

Sous l’ère carolingienne, les Carolingiens mettent fin au duché d’Alsace, divisant la région en deux comtés : le Nordgau et le Sundgau. Cette réorganisation administrative vise à renforcer le contrôle et à améliorer la gestion de la région. Charlemagne, couronné empereur des Romains, crée l’Empire carolingien, un vaste territoire incluant l’Alsace. La centralisation du pouvoir sous Charlemagne stimule le développement économique et culturel, intégrant l’Alsace dans un réseau plus large de commerce et d’influences culturelles.

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À la mort du fils de Charlemagne, l’Empire carolingien est divisé par le traité de Verdun en 843. L’Alsace et Strasbourg rejoignent alors la Francie orientale, qui deviendra plus tard le Saint-Empire romain germanique. Cette nouvelle configuration place l’Alsace sous une forte influence germanique. La région devient un centre commercial et culturel majeur au sein de l’Empire, profitant d’échanges économiques prospères et de riches interactions culturelles, renforçant son identité unique.

Institutions religieuses, guerres et épidémies

Entre les XIIe et XIIIe siècles, l’Alsace connaît une période de croissance avec la fondation de nombreux monastères et abbayes. Ces institutions religieuses jouent un rôle crucial dans le développement économique et culturel. Parallèlement, plusieurs villes alsaciennes obtiennent le statut de villes impériales, se libérant des tutelles religieuses ou seigneuriales. Cette autonomie politique et économique favorise un dynamisme urbain accru et un commerce florissant, transformant la région en un véritable carrefour de prospérité.

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Les XIVe et XVe siècles sont marqués par des défis pour l’Alsace, notamment des guerres, des épidémies de peste noire et des pillages par des mercenaires. Pour se protéger, dix villes impériales forment en 1354 une ligue appelée la Décapole, visant à défendre leurs intérêts militaires et économiques. Cette alliance renforce la solidarité régionale et améliore la défense contre les menaces extérieures. Malgré ces épreuves, la fin du XVe siècle voit un renouveau économique grâce à une reprise générale, une croissance démographique et l’influence de l’humanisme. Plusieurs villes alsaciennes adoptent la Réforme protestante, illustrant la diversité religieuse et culturelle de la région.